Le gisant de la reine Bérengère retrouve enfin son emplacement initial, au choeur de l'église abbatiale de l'Abbaye Royale de l'Épau. Ce chantier de restauration a permis d'améliorer les conditions de conservation et de préservation de l'ouvrage datant du XIIIème siècle.
Une véritable enquête scientifique et historique
Le gisant de la reine Bérengère, redécouvert en 1816 et transféré cinq ans plus tard dans la cathédrale du Mans, se trouvait dans la salle capitulaire de l'Abbaye Royale de l'Épau depuis 1988. Après plusieurs années de recherches, de mois de travaux - une vraie enquête historique et scientifique -, le gisant retrouve sa place originelle au sein de l'église abbatiale.
La réception des travaux s'est tenue ce lundi 30 novembre, à l'Abbaye Royale de l'Épau, en présence de Dominique Le Mèner, Président du Conseil départemental, de François Jeanneau, Architecte en chef des Monuments Historiques, de Jocelyn Martineau, de la Direction Régionale des Affaires Culturelles (Drac) des Pays de la Loire, de Gérard Fuseau, de la Fondation du Patrimoine, ainsi que des artisans ayant œuvré à la restauration. « Cela a été un travail compliqué, d'orfèvre, remarquable du début à la fin », a salué Dominique Le Mèner. « Ce déplacement nous permet de progresser dans la connaissance de ce cycle de l’Abbaye Royale de l’Épau. »
Ce chantier de restauration, labellisé "Chantier de France", a mobilisé les savoir-faire et l'expertise de métiers d'arts ancestraux, tout en intégrant les techniques d'investigation innovantes d'aujourd'hui.
Propriété de l'État, le gisant est classé au titre des immeubles par liste de 1862. Il fait l'objet d'une convention de dépôt entre le ministère de la Culture / Direction régionale des Affaires Culturelles des Pays de la Loire et le Conseil départemental de la Sarthe.
Pourquoi déplacer le gisant ?
Un important travail de recherche et d'études historiques et archéologiques en amont ont permis de documenter la connaissance du gisant et d'orienter les choix du Département sur la détermination du choix final d'implantation guidée par des motifs symboliques, historiques et conservatoires, et sur le programme de travaux.
En 2018, une étude historique et architecturale générale, intégrant des relevés de polychromie et un diagnostic sanitaire complet, a permis de valider la faisabilité du déplacement du gisant dans le choeur de l'église abbatiale, où sont traditionnellement inhumés les fondateurs d'une abbaye. Les connaissances historiques et l'étude des fragments du tombeau, retrouvés récemment dans le dépôt lapidaire du site de l'abbaye, n'ont pas permis d'établir avec certitude la configuration et l'emplacement d'origine du tombeau et de ses premiers déplacements. Cette opération bénéficie d'un accompagnement de la DRAC des Pays de la Loire.
Préserver le gisant
Ce déplacement a pour objectif l'amélioration des conditions de sa conservation, mais aussi de sa présentation. Le public pourra désormais s'approcher du tombeau, tel que découvert par Stothard en 1817. Le remontage du tombeau comprend la réintégration de trois panneaux, sculptés en pierre et retrouvés récemment, du coffre constituant le socle du gisant. L'intérêt patrimonial du gisant et sa fonction religieuse devant être représentés, son déplacement dans le choeur de l'église abbatiale portait le plus de sens et une véritable portée historique.
Un "Chantier de France" mêlant savoir-faire ancestraux et techniques scientifiques de pointe
Le chantier de restauration et de déplacement du gisant a obtenu le label "Chantier de France", label créé à la suite de l'incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris et visant à transmettre le savoir-faire des métiers d'arts.
Ces travaux ont été pilotés par le Département, en délégation de maîtrise d'ouvrage des la DRAC des Pays de la Loire sous maîtrise d'oeuvre du Cabinet Architrav et de son responsable François Jeanneau (architecte en chef des Monuments Historiques).
La nature des travaux à engager a nécessité le recours à des experts des domaines concernés et permis aussi d’expérimenter des techniques nouvelles ou innovantes (nettoyage au laser de l’ensemble du gisant sculpté et des 3 côtés du socle, expertise au Carbone 14 de la datation des ossements du tombeau...).
Les entreprises – prestataires
Un financement innovant
Le coût de ce déplacement, accompagné par la DRAC des Pays de la Loire, s’élève à 218 000€ (dont 41 % sont pris en charge par le Conseil départemental de la Sarthe, 36 % par l’État sur l’ensemble de l’opération et 23 % Fondation du Patrimoine - mécénat et subvention).
La Fondation du Patrimoine a notamment lancé une souscription nationale pendant un an, pour financer une partie des travaux. Première institution de défense du patrimoine, la Fondation du patrimoine sauve chaque année plus de 2 000 monuments, églises, théâtres, moulins, musées... et participe activement à la vie des centres-bourgs, au développement de l’économie locale et à la transmission des savoir-faire. Depuis le lancement de son action en 2000, la délégation de la Sarthe a accompagné plus de 250 propriétaires dans leurs projets de restauration en leur octroyant le label de la Fondation du patrimoine. Plus de 13 M€ de travaux de restauration ont ainsi été soutenus.
Grâce aux campagnes de mécénat populaire lancées avec les mairies ou les associations, la Fondation du patrimoine permet à tous les habitants d’une commune de se rassembler autour de l’histoire, de partager une identité et des racines et de préserver les métiers du patrimoine. Plus de 100 projets sarthois ont été soutenus en 20 ans, générant 1 M€ de dons et plus 10 M€ de travaux. À cela s’ajoute l’octroi, par la délégation de la Sarthe, de 620 000 € de subventions aux porteurs de projets.
L'histoire continue ?
Une fouille archéologique préventive prescrite par la DRAC en suivi de travaux, réalisée de septembre à novembre 2020 par Jean-Yves Langlois de l'Inrap, a permis de retrouver à l'intérieur du gisant, des restes humains exhumés dans la salle capitulaire par Pierre Térouanne en 1961, ainsi que des reliques placées dans un sac plastique à la fin des années 1980. Même si leur attribution à la reine Bérengère doit être relativisée, ils n'en constituent pas moins une importante découverte qui fera l'objet d'une étude anthropologique.
Des travaux ont également été menés par l'Inrap / SRA (Service régional de l'Archéologie) concernant le coffre sous le tombeau. Sont ressortis de l'ouverture du coffret, 4 lots différents répartis en trois matériaux :
- des os humains ceux qui accompagnaient le gisant depuis le XVIIème siècle, et le squelette de la tombe du chapître),
- des fragments de tissus (XVIIème ou XIXème, voire XXème siècle)
- une médaille (XIXème ou XXème).
Les os vont être étudiés par une anthropologue du CNRS de Caen (étude biologique, prélèvement notamment de dent pour la détermination de l'âge, C14). Les tissus vont être étudiés et consolidés autant que faire se peut, compte tenu de leur état. La médaille va être consolidée et identifiée. Selon les résultats, il sera décidé si le coffre a vocation à être replacé sous le gisant.
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